Libérés des visites incontournables de Borobodur et des temples hindous de Prambanan , le compte à rebours déclenché , que faire de ces quelques jours qui nous restent avant notre retour sur Jakarta ?
"La route" , comme une évidence , rejoindre tout d' abord l' océan Indien , puis pourquoi ne pas retourner sur Semarang ?
Mercredi 4 avril
Un dernier regard sur les majestueux temples de Prambanan et nous prenons la route ..La carte ne laisse pas deviner le paysage en dent de scie qui nous attend : montagnes de pierres volcaniques que nous franchissons plus ou moins facilement . Parfois les paysans ont construit des terrasses pour cultiver , en retenant le peu de terre qu' il
y a avec des murets de pierres . C'est un paysage assez désolé , mais habité quand même . On y croise beaucoup de monde à pied , des gens chargés , trainant parfois de petits chariots bruyants , des visages marqués par la rudesse de la vie .
Puis nous arrivons à la mer , Pantai Baron . Pantai ça veut dire plage alors nous sommes tout surpris de nous retrouver entre des falaises face à une mer grise et démontée , devant cette fureur , ces vagues immenses qui se fracassent bruyamment contre ces falaises . C' est un endroit de week-end , un lieu délaissé en semaine . Il y a là un hotel , 5 ou 6 chambres de plein pied qui donnent sur une cour couverte d' une treille . Nous sommes les seuls clients et depuis notre chambre nous regardons tomber la pluie drue sur le bitume de la cour qui ne tarde pas à inonder .
Jeudi 5 avril
Nous longeons la côte sans la voir , toujours dans ce paysage de chaos . Belle pause sur une plage accueillante , cauris et pierres ponces viennent alourdir nos sacoches .Très
tôt la pluie vient contrer nos vélléités de pédalage , abri dans une gargote : riz frit trop gras ... A la première éclaircie nous repartons pour retrouver quelques kilomètres plus loin un ciel menaçant . Arrêt dans une école au milieu de nulle part juste avant le déluge . On installe la tente moustiquaire dans une classe , frustrés de ne pouvoir échanger que quelques mots avec nos hôtes très sympas qui n' ont malheureusement pas plus de vocabulaire d' anglais que nous de bahasa indonesia.
Vendredi 6 avril
Après la séance photosouvenir avec nos hôtes , nous reprennons la route pour encore quelques kilomètres de paysage rude , avant de nous retrouver dans un environnement plus doux , avec des dénivelés moins cassants . On traverse Baran , un gros bourg . Indomaret on s' arrête ,
razzia dans notre supérette préférée : boisson à la mangue , barres chocolatés "beng beng" , nous arrosons le passage de nos 5000 kms .On déclare forfait tôt , un peu fatigués , il y a un hôtel agréable sur le bord d' un lac . Lessive et autres agréments au programme de l' après midi . Le soir nous dinons sur une table basse , assis en tailleurs dans un restaurant avec vue sur le lac . Ayam kampung et nasi putih , poulet fermier avec du riz , en compagnie de touristes locaux qui profitent du congé de Pâques , en Indonésie c'est le vendredi qui est férié .
Samedi 7 avril
Encore une journée tranquille , sans circulation . Nous pédalons sur le flanc du volcan Lawu , nous demandons notre chemin sans arrêt , un peu perdus dans un imbroglio de petites
routes . Parcours avec autant de descentes à pic sur des rivières que de remontées abruptes sur les arêtes du volcan. Eva saute de sa troisième roue dés que l' élan pris en descente fait défaut , et marche à côté des vélos .
Le paysage très beau , rizières en espalier et scènes de vie rurales nous font presque oublier l' effort. En fin de journée nous demandons dans une école pour passer la nuit , mais ça à l' air de poser problème au gardien alors nous n' insistons pas . Quand quelques kilomètres plus loin nous trouvons un hôtel nous sommes alors bien contents de faire reposer notre fatigue .
Dimanche 8 avril
Aujourd'hui nous avons un but , rejoindre le candi Sukuh à 1000 mètres d' altitude . Curieusement depuis la mer nous n' avons pas l' impression d' avoir plus monté que descendu alors nous nous attendons à une rude journée . Et en effet ça monte , gentiment au début , sérieusement ensuite et carrément méchamment à
la fin . Nous finissons arqueboutés sur nos vélos , poussant . Seul Manuel qui met un point d' honneur à ne pas mettre pied à terre pédale jusqu' au bout . Nous sommes trempés non pas de pluie mais de sueur lorsque nous nous présentons au "Sukkuh cottage" un resort qui nous a tout l' air de luxe. Le patron sympa nous demande combien nous voulons payer pour la chambre et accepte gentiment notre prix . On se retrouve dans cet endroit paradisiaque dans une ambiance bien inhabituelle pour nous avec une clientèle d' expats en week-end et de touristes occidentaux en tour. Dans un environnement magnifique , entouré de girofliers , le candi Sukuh est très surprenant avec sa forme de pyramide aztèque et ses bas-reliefs très primitifs.
Lundi 9 avril
Nous quittons le cottage comme nous y sommes arrivés , à pied , retenant nos vélos qui ne demandent qu' à débouler . Puis quand la descente se fait plus douce nous profitons de 30 kms en roue libre , traversant au départ des villages visiblement intégristes et l' on en prend encore une fois
plein la vue , beaux villages avec des maisons traditionnelles javanaises en bois , rizières en terrasses encore et toujours , et nous réalisons que la montagne c' est fini quand nous croisons les premiers vélos .
Les bords de la route sont à présent très habités , les
mosquées trapues se succèdent . C' est d' ailleurs dans l' enceinte d' une mosquée que nous passons la nuit dans une classe de l' école coranique . Nous y installons notre tente moustiquaire entourés d' une foule de curieux , enfants et adultes . Assez étouffant ...
L' imam tente bien d'éloigner la foule , mais la tentation est trop forte pour les villageois de se photographier aux côtés des petits " bule " .
Des femmes nous apportent du " gado gado" enveloppé dans des feuilles de bananier , c' est bon bien qu' un peu surprennant , un mélange de cubes et de rondelles de manioc et de
soja et autres aliments indéfinis baignant dans une sauce épicée à la cacahuète .Des visages restent collés aux vitres de notre " chambre" une ou deux heures après la nuit tombée ...
Mardi 10 avril
Nous sommes aux premières loges pour l' appel à la prière , réveil en sursaut à 4h30 , une heure avant le lever du jour ...
Debout avant l' aube nous nous retrouvons très tôt 
devant la curiosité de la région : des boues volcaniques qui jaillissent de la terre .
Nous savourons notre avant dernier jour de pédalage à sa juste valeur , en nous répétant que tout ce que l' on voit là , ces chargements abracadabrant sur les vélos
et les mobylettes , tous ces gens qui nous sourient , nous saluent , ces enfants qui crient à notre passage " Hello Mister ! " ou bien " bule ! " ( étranger) , tous ces gens charmants à qui nous demandons notre chemin , ce sera fini demain .On fait le choix d' une école pour dormir ce soir , mais Erlina qui se trouve là nous
invite chez elle . Elle nous accueille avec cette simplicité et cette décontraction toute javanaise qui font que l' on se sent si à l'aise sur cette île . Accueil où l' on retrouve cette générosité toute musulmane qui n' est pas sans nous rappeler la Syrie ou le Maroc .On se régale de sate ayam ( brochettes de poulet arrosée de sauce à la
cacahuète ) , d' ayam bakar , poulet au four , de riz évidemment en compagnie d' Erlina , de son adorable petite fille Clarysia et de ses parents . Une soirée très chaleureuse .
Mercredi 11 avrilNous avons rejoint Semarang par de petites routes encore une fois bien tranquilles , mais ruinées par la mousson .
Ca y ' est , la boucle est bouclée
Jakarta , Indonésie , le 14 avril 2012